Ses débuts
Enfant chétif, Joseph Pilates souffrait de rachitisme, d’asthme, et de rhumatisme articulaire. Afin de retrouver sa santé, il se met à étudier l’anatomie et observe les animaux dans les bois. « Prenez un cheval », dit-il un jour en discutant du conditionnement physique. « Si quelqu’un souhaite lui faire faire des courses, il l’entraîne pour qu’il soit dans la meilleure forme possible. Pourquoi ne pas aussi garder les humains dans la meilleure forme possible ? »
Il imagine alors que la santé mentale et physique sont reliées, et étudie des disciplines à l’époque très exotiques telles que le yoga et différents arts martiaux. Il intègre ces pratiques à des activités corporelles occidentales telles que la gymnastique ou la boxe, incorporant également des formes grecques et romaines anciennes d’exercices physiques. Il est persuadé qu’un style de vie « moderne » (mauvaise posture, respiration incorrecte, exercices ignorant les muscles posturaux…) est un élément qui participe de façon déterminante à une santé fragile.
Alors jeune homme, déjà plongeur et gymnaste, Joseph déménage en 1912 en Angleterre où il boxe professionnellement, et enseigne l’auto-défense dans les écoles de police et à Scotland Yard. Pour gagner sa vie, il participe aussi à un numéro de cirque avec son frère, où il joue la statue grecque.
L’expérience de son emprisonnement
Quand la Grande-Bretagne rejoint la Première Guerre mondiale, comme tous les citoyens allemands résidant au Royaume-Uni, il est fait prisonnier en tant que « étranger ennemi » dans un camp d’internement situé dans l’île de Man. Ces circonstances difficiles lui permettent néanmoins de mettre en place les fondements de la méthode Pilates telle qu’elle est connue aujourd’hui. Dans ce camp d’internement, il enseigne les exercices qu’il conçoit à ses compatriotes également internés, en agissant en quelque sorte comme leur prof de gym/physiothérapeute. C’est également ici qu’il développe le concept de ses ‘machines’, réalisant l’efficacité qu’il pourrait en obtenir avec des personnes non entraînées, comparée au travail sur tapis. Il démantèle donc un lit superposé, y attache les ressorts du sommier, et commence à utiliser cet appareil à fins de rééducation.
L’efficacité de son approche « holistique » quant à la santé devient évidente lors de la pandémie de grippe qui s’abat sur le monde entier en 1918. « Vraie » grippe meurtrière, elle décime des populations entières, et les lieux où la place est limitée et les gens mal nourris, tels que les camps d’internement, sont particulièrement affectés. Malgré cela, toutes les personnes qui suivent la méthode de Joseph Pilates survivent, et il explique cela par un rapport direct de cause à effet.
Son retour en Allemagne
Une fois libéré, il retourne en Allemagne et continue de former des policiers à Hambourg, et travaille également avec des experts de la danse et de pratiques corporelles tels que Rudolf Laban. Quand la nouvelle armée allemande cherche à lui forcer la main pour qu’il y devienne entraîneur, il quitte le pays et émigre aux États-Unis. C’est lors du voyage en bateau qu’il rencontre sa future femme, une infirmière nommée Clara. Il se marient et fondent à New York leur studio, et y enseignent sa méthode de conditionnement physique qu’ils appellent « Contrology ».
Son installation à New York
Nombre de fervents adeptes suivent cette méthode alors révolutionnaire, qui met l’accent sur la respiration dans l’exercice, et un accord entre le mental et le physique dans l’approche de la pratique. Les danseurs des compagnies de danse new-yorkaises embrassent le Pilates, celui-ci leur permettant une rééducation accélérée des diverses blessures inhérentes à leur travail, et de se renforcer tout en gardant leur souplesse.
Martha Graham, arrivée à New York en 1923, et George Balanchine, qui a émigré aux États-Unis en 1933, sont tous deux des inconditionnels du Pilates et envoient régulièrement leurs élèves au studio de « Uncle Joe ». Danseurs et chorégraphes légendaires, la première sera la créatrice du Martha Graham Center of Contemporary Dance et de la Martha Graham Dance Company, le deuxième sera plus tard le cofondateur du New York City Ballet.
Incapable de transporter ses appareils, Joseph Pilates enseigne également sa méthode sur tapis durant l’été à des jeunes danseurs dans le Massachusetts. Ses cours, qui durent une heure, commencent toujours par un travail sur la respiration, un élément fondamental du Pilates, outil essentiel, parfois pris, par erreur, pour une fin en soi.
Décès
Joseph Humbertus Pilates s’éteint en 1967 à New York à l’âge de 83 ans, après avoir dédié sa vie au bien-être et la santé d’autrui, et enseigné avec sa femme Clara dans leur studio pendant plus de 40 ans. Clara le rejoindra dix ans après, en 1977.
La Méthode
La respiration, une posture correcte, une emphase mise sur le développement harmonieux des muscles posturaux, des mouvements effectués sans hâte mais avec une précision parfaite sont les spécificités de sa méthode, qu’il explique en détail dans ses deux livres, Your Health: A Corrective System of Exercising That Revolutionizes the Entire Field of Physical Education publié en 19342 et Return to Life Through Contrology, publié en 1945 (photos de George Hoyningen-Huene)3.
Développement
Le Pilates commence alors à être enseigné partout dans le monde par les « anciens », comme les premiers élèves de Joseph Pilates seront appelés. Leur enseignement varie selon leur approche, leur expérience personnelle et leur compréhension de la méthode et cela produira différents styles de Pilates. Inévitablement, des querelles de clochers s’ensuivront, qui auront souvent plus à voir avec des politiques de marketing qu’avec le Pilates lui-même.
Bibliographie